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Photo du rédacteurParoisse Protestante

19 janvier : "qui a été conçu du Saint-Esprit et qui est né de la vierge Marie"

Dernière mise à jour : 14 juin 2023

Lire la naissance du prophète Samuel : 1 Samuel 1, 1-20 et 2, 1-11 et le magnificat : Luc 1, 39-56.

Après avoir étudié la divinité de Jésus à l'article précédent, « Fils unique » de Dieu, c'est maintenant l'incarnation qui est exposée par le Symbole avec ce qu'on peut appeler le double « mystère » ou le double « miracle » de la conception du Saint-Esprit et de la naissance virginale.


Le « mystère », c'est l’événement dans sa signification, le « miracle » c'est le signe qui l'atteste.


Histoire de Samuel


Après la sortie d'Égypte, le peuple est installé dans la terre promise et à l'inverse des autres peuples, il n'a pas de roi. Ce sont des juges qui exercent un pouvoir d'arbitrage entre les individus et les groupes sociaux. Samuel naît dans un temps « où la parole de Dieu était rare » (1 Samuel 3, 1) et il sera juge en Israël (7,15). Le récit de sa vocation est émouvant : « parle, Éternel, car ton serviteur écoute » (3, 10).


Samuel doit désigner le roi, ce sera d'abord Saül (10) puis David (16) alors que Saül est encore roi et David devra conquérir le royaume promis. L'étymologie du nom Samuel, Chaoul, signifie « prêté », Samuel est celui-qui est prêté à l'Éternel par sa mère (1,28) autrement dit, c'est un homme consacré au service de Dieu.

Anne, sa mère devient enceinte alors qu'elle était stérile. On peut remarquer que tous les rites religieux depuis l'aube des temps sont d'abord des rites de fécondité ou de prospérité, destinés à l'enfantement ou au succès des récoltes. Et la religion d'Israël ne fait pas exception, on va prier le Seigneur pour qu'il donne un enfant.

Y-a-t-il d'autres femmes stériles dans la Bible ?


Sara, femme d'Abraham, enfante Isaac – Rebecca, femme d'Isaac, enfante Jacob – Rachel, femme de Jacob, enfante Joseph et Benjamin – la femme de Manoah (Juges 13, 2-3ss) enfant Samson, le naziréen – Anne, femme d'Elquana, enfante Samuel, le « prêté » - Élisabeth, femme de Zacharie, enfante Jean, le baptiste.

Marie, n'est pas stérile mais « jeune fille » et par extension, « vierge ».


Pourquoi ces récits de stérilité ?


Depuis Abraham jusqu'à Joseph, Dieu a choisi des femmes stériles pour marquer le caractère non naturel et souligner son intervention, signifier qu'il est un Dieu qui se révèle et non pas un Dieu qui se découvre dans les choses de la nature (cf. le Buisson ardent). Il ne se manifeste pas dans les phénomènes naturelles, il n'est pas dans le tonnerre ni dans les arbres ni dans les créatures (cf. ce qui a été dit sur la création : Dieu toujours à distinguer de la nature, de toute la nature, c'est donc l'inverse du Deus sive natura de Spinoza).

C'est toujours une « annonce » de la naissance, une explication de l'expérience.


Quel intérêt pour Luc de rattacher l'expérience de Marie à celle de Anne ?


Il s'agit avant tout de conforter la filiation avec la royauté (N.B. C'est Joseph qui descend de David et non pas Marie) et aussi de souligner la consécration de l'enfant : les fils de stériles sont soit des patriarches (N.B. Joseph, fils de Jacob et aussi Matthieu 1,14) soit des Naziréens soit des « prêtés » soit des baptistes.

L'intervention de Dieu est nécessaire pour marquer le caractère exceptionnel de l'enfant qui va naître, le fils de la promesse.


Pourquoi devait-il être conçu du saint-esprit ? C'est-à-dire sans Joseph.


Pour signifier que ce n'est pas un homme, aussi vertueux serait-il, qui peut «réparer» la désobéissance de l'humanité. L'intervention directe de Dieu est nécessaire

- pour assurer l'efficacité de la Miséricorde (corréler à la miséricorde, mot-clé du Magnificat)

- pour l'efficacité de la Révélation : la représentation de Dieu par lui-même. Pas d'intermédiaire entre Dieu et l'humanité mais c'est Dieu qui devient homme. Toujours veiller à éviter toute confusion entre Dieu et les créatures. Il n'y a rien qui représente Dieu.


Qu'est-ce qui représente Dieu dans la culture des premiers siècles ?


Les idoles évidemment. Dans l'univers mythologique des premiers siècles, c'est-à-dire dans le régime de croyance qui était celui des contemporains de Jésus et des lecteurs de l'évangile de Luc, les dieux sont omniprésents et représentés par leurs effigies qui sont autant de « maisons » où le divin peut être consulté, nourri, sollicité. Le christianisme naissant, d'origine hébraïque, doit et veut se démarquer des religions gréco-latines. Il faut donc que le Sauveur/Seigneur/Messie/Christ/Oint/Élu soit radicalement autre, non seulement des dieux grecs mais aussi de l'humanité.


« Conçu du Saint-Esprit » exprime cette radicale altérité de Dieu par rapport à l'humanité.


« Né de la vierge Marie » exprime au contraire l'absolue proximité d'un Dieu qui est plus proche de nous que nous ne le sommes de nous-mêmes suivant l'expression de saint Augustin (Tu autem eras interior intimo meo et superior summo meo, « mais, toi, tu étais plus intime que l’intime de moi-même et plus élevé que les cimes de moi-même », Confessions III, 6, 11 in Paul-Augustin Deproost, « La quête augustinienne du sublime dans les Confessions, un parcours sur les chemins de l’intériorité », Cahiers des études anciennes [En ligne], LVI | 2019, mis en ligne le 19 mai 2019, consulté le 13 juin 2023. URL : http://journals.openedition.org/etudesanciennes/1317).


L'altérité dans la proximité, la « descente de Dieu du ciel vers la terre », voilà le véritable mystère/message de l'incarnation.


C'est ainsi que l'incarnation devient la formule de la médiation, de la relation entre Dieu et l'homme, d'une relation qui n'est pour les chrétiens possible qu'en Christ. Cf. la connaissance de Dieu qui n'est possible qu'en Christ. À corréler à la fonction grammaticale du verbe (cf. Bible en mains du 22 octobre, la signification du Logos), le verbe est ce qui relie le sujet (Dieu) avec l'objet (l'homme) en rapport l'un avec l'autre : Dieu n'est pas Dieu sans l'homme comme l'homme n'est pas l'homme sans Dieu. C'est un rapport de nécessité réciproque.


L'enjeu théologique, tel qu'exprimé dans les symboles œcuméniques, c'est de toujours tenir ensemble la divinité et l'humanité complète de Jésus. « Vrai Dieu, vrai homme » selon la formule de Chalcédoine (451) ; Ce qui signifie que dans la Passion, Dieu meurt vraiment et l'homme meurt vraiment, ce n'est pas une partie de Jésus qui meurt quand l'autre survivrait et de même, dans la résurrection, c'est l'homme qui ressuscite autant que Dieu. La divinité de Jésus est nécessaire pour garantir l'efficacité de la miséricorde, son humanité l'est pour que nous puissions en vivre, vivre comme lui.


De ne pas être « fils d'Adam » mais « fils de l'homme/fils de Dieu » signifie qu'en Christ, c'est une nouvelle humanité qui débute avec de nouvelles règles : (Romains 5, Christ nouvel Adam qui n'est plus sous la fatalité du péché et de la mort). La grâce de Dieu rend désormais possible la décision, l'acte décisif de la foi.

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